Réformes 2017:
Quels sont les impacts de la fusion Agirc Arrco pour les salariés ?
Le Vendredi 17 novembre 2017, le patronat et les syndicats ont achevé la négociation sur la fusion des caisses de retraites complémentaires des salariés du privé. Dès le 1er janvier 2019, la fusion Agirc-Arrco qui résulte d’un accord, signé en octobre 2015 par les partenaires sociaux pour sauver les deux régimes, sera effectif.
Avec la réforme sur la hausse de la CSG on en oublierait presque cette fusion, mais l’enjeu est de taille car la retraite complémentaire représente 57 % de la pension totale d’un cadre et 37 % de celle d’un non-cadre.
Ce changement ne se fera donc pas en faveur des salariés, avec dans la plupart des cas, une baisse de salaire net importante, qui pourrait rendre insignifiante le gain tiré de la réforme des cotisations engagée par Emmanuel Macron.
Comment expliquer un tel changement ?
C’est un bouleversement qui se prépare dans le monde des organismes de retraite, où, jusqu’aujourd’hui, tout ajustement financier devait passer par une négociation entre les partenaires sociaux. Les revalorisations des retraites pouvaient être gelées mais les niveaux des pensions déjà liquidées n’ont jamais été ainsi touchés auparavant.
En premier lieu, cette fusion est établie dans le but d’harmoniser les deux régimes, puisque les taux et les assiettes de cotisation seront désormais les mêmes pour tous les salariés, ce qui est le cas pour la répartition entre la part due par le salarié (40%) et celle payée par l’employeur (60%).
Ces mesures ont aussi été prises pour tenter de rééquilibrer les comptes de ces caisses complémentaires, très lourdement déficitaires (-2,1 milliards d’euros en 2016). Elles découlent en réalité d’un accord trouvé en 2015 par les partenaires sociaux (patronat et syndicats) qui espéraient que ces modifications concernant les cotisations sociales rapportent près d’1,7 milliard d’euros à l’horizon 2020.
En plus de ces mesures, le projet d’accord instituant le nouveau régime unifié Agirc-Arrco, vise à créer 2 nouvelles “contributions d’équilibre”, en lieu et place de plusieurs dispositifs : l’AGFF, qui permet actuellement aux salariés de recevoir leur pension à taux plein dès l’âge légal, la “Contribution exceptionnelle et temporaire”, ainsi que la “Garantie minimale de point” (GMP), qui assure actuellement aux cadres aux revenus les plus modestes d’obtenir un certain nombre de points en vue de leur future pension, moyennant une participation supplémentaire. Ce qui va aboutir, encore une fois, à une hausse des cotisations de la plupart des salariés.
Pour atteindre ces objectifs de rééquilibrage financier, le nouveau régime de retraite complémentaire sera doté d’un système de pilotage quasiment automatique qui lui donnera la possibilité de moduler le niveau des pensions en cas de déficit financier. Ainsi, il pourra jouer sur ce qu’on appelle « la valeur de service du point ».
En effet, les deux régimes de retraite étant exprimés en points, ceci signifie que les cotisations sont transformées en un certain nombre de point de retraite que le salarié accumule durant de sa carrière. Mais le réel problème est que les règles relatives aux points Arrco et Agric n’étaient pas les mêmes. C’est pour cela que dans le futur régime unifié, le point Agirc disparaîtra et c’est le point Arrco qui deviendra l’étalon. Les droits acquis et les points Agirc des cadres seront remaniés en points Arrco.
Quels sont les répercussions d’un tel remaniement ?
Ce nouveau régime serait à cotisations définies. A proprement parler il ne serait plus question d’augmenter les cotisations des employeurs et des salariés, donc d’apporter des ressources financières supplémentaires dans les caisses du régime. En somme, la principale variable d’ajustement sera le niveau des pensions des futurs et également des actuels retraités.
Mais les salariés n’y trouveront pas forcément leur compte une fois à la retraite. Car effectivement, plusieurs de ces nouvelles cotisations ne sont pas génératrices de droits à pension, notamment le taux d’appel et les nouvelles contributions d’équilibre. Pire, pour les non-cadres gagnant moins d’un plafond de la sécurité sociale (soit 39.228 euros brut en 2017), ces nouveaux prélèvements n’engendreront aucun nouveau droit.
Les personnes nées durant ou après l’année 1957 et qui choisiront de faire valoir leurs droits retraite dès leur taux plein atteint à partir 62 ans, verront aussi leurs retraites complémentaires AGIRC et ARRCO minorées de 10 % durant 3 ans, et cela jusqu’à leurs 67 ans maximum. Autrement dit, elles ne seront plus immédiatement versées à 100 % comme c’est encore le cas, mais à 90 % seulement durant 36 mois.
Il est possible d’échapper à ce malus en travaillant 4 trimestres civils en plus , ce qui reviendra à repousser sa date de départ à 63 ans au lieu de 62 ans pour une personne ayant atteint son taux plein à cet âge-là.
Même sentence pour les personnes pouvant se prévaloir d’une carrière longue : leur départ devra se faire à 61 ans et non à 60 ans, mais sans possibilité pour elles de profiter d’une quelconque surcote, puisque celle-ci n’est comptabilisée qu’au-delà de l’âge légal de départ.
Pour les parents, les majorations de pension plafonnées à un peu plus de 1.000 euros par an, à l’Agirc comme à l’Arrco ne sera plus ni à 1.000 ni à 1.500 euros, mais devrait s’établir à 2.000 euros pour tous.
L’opération pourrait engendrer une baisse de 9% des pensions Arrco et Agirc sur 15 ans et certaines cotisations de retraite complémentaire propres aux cadres vont disparaître avec le régime des cadres Agirc, en particulier la garantie minimale de points (GMP). Dans le cadre de la négociation sur la fusion Agirc-Arrco , elle a contraint les partenaires sociaux à imaginer des contributions de remplacement pour financer les droits acquis.
Concernant les cadres, même si la cotisation de garantie minimale de points (GMP), qui crée un supplément de droits à pension pour les cadres les moins bien payés, et la contribution exceptionnelle et temporaire (CET), il faudra tout de même servir les droits acquis jusqu’à leur extinction. De ce fait, durant plusieurs années, la nouvelle contribution d’équilibre technique va permettre de solder le passé. A la différence de la GMP, la nouvelle contribution ne créera pas de droits pour ceux qui cotisent.
Mieux visualiser les impacts de cette Fusion Agirc-arcco sur les salariés :
Voici des exemples concrets sur l’impact de cette réforme sur votre fiche de paie et sur vos droits à la retraite :
Non cadre touchant 48.000 euros par an :
L’augmentation du taux de cotisation au-delà de 1 plafond de la sécurité sociale rogne son salaire net, mais lui permet d’engranger des points supplémentaires pour la retraite. En revanche, il subit plein pot la hausse du taux d’appel et les nouvelles contributions techniques, sans compensation pour sa future pension.
Non cadre touchant 144.000 euros par an :
Grosse perte de salaire pour ce profil gagnant bien sa vie. C’est principalement dû au fait que la partie de son salaire supérieure à 3 plafonds de la Sécu (soit 117.684 euros en 2017) sera soumise à des cotisations en 2019, ce qui n’était pas le cas auparavant. Cela sera tout de même compensé par l’obtention de nombreux points supplémentaires en vue de la retraite.
Cadre touchant 36.000 euros par an :
C’est le seul profil qui va toucher un salaire net plus élevé en 2019. La raison ? Actuellement, ce salarié, à l’image de tous les cadres gagnant moins de 43.338 euros brut en 2017, bénéficie de la garantie minimale de points (GMP), qui lui assure d’acquérir 120 points Agirc, en contrepartie d’une cotisation supplémentaire. En 2019, la GMP disparaîtra, et la cotisation avec, ce qui va donc doper sa fiche de paie. Mais attention : dans le même temps, ce salarié ne pourra plus obtenir de points Agirc. Il va donc perdre beaucoup de droits à la retraite. Au final, il ne sort pas vraiment gagnant de l’opération…
Cadre touchant 168.000 euros par an :
Autre constat pour ce profil de cadre, avec une baisse de salaire et une petite hausse des droits de pension. Ces 1.368 euros de cotisations supplémentaires en 2019 rapporteront seulement 54 euros de retraite brute en plus par an à taux plein, soit un rapport de 3,95%. Faible comparé au rendement moyen de 6% du régime.